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Afriquedomtomnews, blog géré  par Isabelle Gratien-Eboué, journaliste indépendante

Salon du chocolat 2019 : la Côte d'Ivoire et le Ghana veulent imposer un prix minimum sur l'exportation de leur cacao aux industriels mondiaux

3 Novembre 2019 , Rédigé par Isabelle Gratien Publié dans #evenements

Salon du chocolat 2019 : la Côte d'Ivoire et le Ghana veulent imposer un prix minimum sur l'exportation de leur cacao aux industriels mondiaux
Madame Habi-Bata TOURE-DOUKOURE, en charge du service promotion du cacao

Madame Habi-Bata TOURE-DOUKOURE, en charge du service promotion du cacao

C'est le Rendez-vous incontournable des amoureux du chocolat et des producteurs de cacao. Le Salon du chocolat 2019 a ouvert ses portes du 30 octobre au 3 novembre à Porte de Versailles pour  accueillir 500 participants venus de 60 pays à l'occasion de son 25ème anniversaire présidé par la Marraine, Dominique Ouattara, la Première dame de Côte-d'Ivoire. Deux pays d'Afrique, la Côte d'Ivoire et le Ghana  qui représentent 70% de  la production mondiale souhaitent imposer un prix minimum sur l'exportation de leur cacao aux industriels mondiaux. 

 

Carine-Laure POE, Directrice-adjointe Chargée des Délégations Régionales de la Côte d'Ivoire

Carine-Laure POE, Directrice-adjointe Chargée des Délégations Régionales de la Côte d'Ivoire

Interview avec Carine-Laure POE, directrice-adjointe Chargée des Délégations Régionales au sein du Conseil Cacao de la Côte d'Ivoire nous explique comment va se mettre en place un prix minimum avec la coopération du Ghana sur l'exportation de leur cacao aux pays acheteurs :

 

Question de Afriquedomtomnews : Comment allez-vous mettre en place ce prix minimum du cacao pour les entreprises internationales ?

Réponse de C-L POE : " En ce qui concerne le prix minimum garanti que la Côte d'Ivoire et le Ghana exigent désormais pour son cacao, je voudrais qu'on fasse une nuance. Déjà dans le système de commercialisation  de la Côte d'Ivoire, nous avons un prix minimum garanti. Ce prix est obtenu lors de nos ventes anticipées avec l'accord du gouvernement pour lesquelles les sociétés d'achat, les coopératives , les exportateurs doivent acheter le kilo de cacao ou de café aux producteurs. Cela fait partie du système de stabilisation qui a été mis en place depuis 2012. 

Maintenant concernant la coopération avec le Ghana , on parle plutôt du revenu décent du producteur. On y trouve deux aspects : il y a le prix plancher qui est un prix minimum en dessous duquel la Côte d'Ivoire et le Ghana refuseront de mettre sur le marché le cacao. Et dans cette composante de prix plancher, il faut ajouter ce qu'on appelle le DRD ( le différentiel de revenu décent) . On demande pour chaque quantité de cacao acheté en Côte d'Ivoire et au Ghana que les acheteurs internationaux puissent rajouter 400 dollars sur la tonne. Ces 400 dollars répercutés aux producteurs vont directement aux producteurs.

Ce mécanisme est entrain d'être soutenu par les différentes assemblées nationales en Côte d'Ivoire et au Ghana , de sorte que, ces 400 dollars ne souffrent d'aucune fiscalité. 2600 dollars est notre prix plancher et en dessous de ce prix, on n'expose pas notre cacao sur le marché. 

On est parti sur la base du coût de revient d'un kilo de cacao : depuis l'achat de la parcelle où celle-ci peut être obtenue par un producteur ou un leg familial. Donc, depuis l'exploitation à la base jusqu' à la fève de cacao commercialisable , on fait les calculs et il faut 2600 dollars. C'est à dire les 2200 dollars avec les 400 dollars de DRD qui peuvent permettre au producteur de vivre décemment. On va toujours exiger ces 400 dollars en plus par tonne de cacao. 

Le consommateur doit comprendre qu'en dessous de 2600 dollars la tonne, le cacao n'est pas rentable pour le producteur. Les grands chocolatiers sont déjà partants pour ce prix minimum. L'Union européenne a d'ailleurs fait une belle intervention pour soutenir cette initiative lors de la dernière conférence à la Fondation mondiale du Cacao (World Cocoa Fondation). 

Ce qui est encourageant , c'est qu'on est dans une moyenne qui se tient en comparant le prix de l'Amérique latine ou l'Asie qui exporte avec un prix rentable de 3000 à 3200 dollars la tonne.

Question Afriquedomtomnews : Justement l'Amérique latine récupère 80 à 85 % de son exportation , et vous, vous en  êtes à 60% . Comment vous l'expliquez? 

Réponse de C-L POE : Le cacao est un produit qui a été découvert en Amérique latine et qui a été pendant longtemps consommé par les populations locales . Donc, les producteurs de ces pays ont cette culture de façon ancestrale . Par contre, chez nous, c'est une culture qui a été importée avec la colonisation et adoptée mais qui n'est pas forcémment  rentrée dans nos mœurs de consommation. Donc, on a toutes les conditions de produire davantage car on a moins de problèmes de maladies ou autre. Mais en terme de consommation , il y a ce léger décalage qui fait que l'Amérique latine consomme en majorité ce qu'elle produit contrairement à nous. C'est cela la différence.

 

Question Afriquedomtomnews : Comment allez vous imposer ce prix minimum aux autres industries acheteuses? 

Réponse de C-L POE : "C'est bien de souligner ce mot "imposer" car on ne vendra pas en dessous de ce prix. C'est  notre produit et lorsqu'on le vend, nous obtenons des bénéfices pour notre pays mais à quoi cela servirait-il de vendre à perte? 

Car il faut pouvoir maintenir les producteurs dans la Cacao-culture. Les producteurs de nos jours veulent vivre décemment de leur travail et n'ont pas envie d'être le maillon le plus faible de la chaîne de production.  Donc, quitte à ne pas vendre, on se donnera les moyens de conserver et de transformer . Si les 2600 dollars ne sont pas atteints , on ne vendra pas."

 

Question Afriquedomtomnews : "Cela engendre des emplois, les salaires sont-ils bas ?Comment cela se passe avec  les producteurs de cacao de la Côte d'Ivoire et du Ghana ?"

Réponse de C-L POE :" Aujourd'hui les producteurs ne vivent pas de la Cacao-culture; ils survivent! On ramène leur revenu à ce qui est indiqué comme élément de pauvreté par  la Banque mondiale et les institutions de Bretton Woods, le producteur a moins d'un dollar par jour pour vivre de la Cacao-culture et c'est cette tendance qu'on veut inverser."

 

Question de Afriquedomtomnews : "Quelle  sera votre  stratégie pour convaincre les autres multinationales à adopter ce prix minimum? "

Réponse de C-L POE : " Ce qui a été intéressant et  très simple dans notre démarche est que les multinationales ont été associées. Nous avons travaillé avec le" Cocoa Board" et le Conseil Cacao  pendant plus d'un an sur cette problématique. Puis à la suite des travaux, après des  enquêtes de terrain auprès de nos producteurs,de toutes nos chaînes de valeurs qu'on a sorti cette variable de coût qui est actuel et actualisable. Et pendant deux jours, les 10 et 11 juin derniers, on a réuni tous les chocolatiers, toutes les multinationales, tous les négociants  en présentant ce mécanisme aux multinationales à Accra.  On a rencontré leurs experts qui nous on fait  des propositions et on a fixé ce prix plancher  décent de 2600 dollars par tonne. Si le prix est à 1800 dollars par tonne, les multinationales paieront la différence. Si le marché  pousse à un prix au delà de  3000 dollars par tonne, la différence va dans un fonds de réserve géré par la Côte d'Ivoire et le Ghana qui viendrait soutenir le prix au moment par exemple où le marché serait trop bas et que cela ne dépendrait  pas des multinationales ou de la Côte d'Ivoire. Ce sont des spéculations de l'offre et la demande. Et c'est ensemble qu'on a arrêté cette façon de travailler , cette stratégie d'articuler ce prix plancher à 2600 dollars par tonne. Voici ce qu'on veut faire pour nos producteurs. On les a associé  à la démarche; ils ont fait leurs observations et on en a tenu compte. Chaque année on s'engage et on fait le point par rapport au marché avec nos producteurs. Pour cela des groupes techniques sont mis en place pour travailler avec eux. 

Salon du chocolat 2019 : la Côte d'Ivoire et le Ghana veulent imposer un prix minimum sur l'exportation de leur cacao aux industriels mondiaux
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